Rosans et le Rosanais

Vue du village de Rosans depuis les hauteurs

Résumé de l’histoire de Rosans


Rosans est un village au long passé historique, qui a conservé son aspect médiéval, avec ses rues étroites, ses vieilles maisons et tout le charme qu’il doit à la situation qu’il occupe en Haute Provence. Son site est inscrit à l’inventaire des monuments historiques.
La population de Rosans a varié au cours des âges dans de grandes proportions : 200 âmes vers 1400, 660 âmes en 1690, jusqu’à 868 en 1851, enfin 506 en 1990.
Quelques vestiges préhistoriques ont été trouvés au siècle dernier dans la région, mais ils n’ont été ni conservés, ni identifiés de façon précise. De façon générale il n’existe pas de sites préhistoriques très anciens à l’est du Rhône, car ce dernier a été longtemps une barrière infranchissable. Et les tout premiers venus ne semblent pas avoir franchi les gorges de l’Aygues.
Plus près de nous, à l’époque Gauloise, les habitants de la région de Rosans appartenaient à la Fédération des Voconces qui avait deux capitales : Vaison pour les Voconces du sud, Die pour les Voconces du nord. Leur territoire s’étendait jusqu’au col de Saulce, entre Rosans et Serres. Au delà on trouvait les Tricoriens qui occupaient la vallée du Buëch.

Le plus ancien document dans lequel le nom de Rosans semble être mentionné est le testament d’Abbon, qui en 739 lègue à l’abbaye de Novalaise les propriétés qu’il possède à « Rodanone ». Le nom de Rosans vient-il des roses trémières qu’un chef sarrasin y cultivait, d’après une légende souvent citée ? explication charmante, trop belle pour être vraie. Il est hautement probable que Rosans provient du nom d’un domaine gallo-romain terminé par le suffixe « -anum » : vraisemblablement « Le domaine de Rosus », un surnom latin dérivé de « rosa : la rose » un terme caressant.
On estime que c’est après le passage des Lombards et des Sarrasins (apparus en 719 à Narbonne) que Rosans s’est installé dans son site actuel, édifiant un bourg fortifié sur un petit mamelon, jouissant de possibilités de surveillance et de défense exceptionnelles.
C’est là qu’aurait été construite la première église Saint-Arey. Détruite, reconstruite, améliorée au cours des ans, elle existe toujours. Son clocher rajouté en 1714 montre et égrène les heures pour les Rosanais. Plusieurs sources indiquent que le village abritait deux tours carrées et parallèles construites à la fin des années 1100. Carrées car la technique des tours rondes n’a été connue qu’au siècle suivant, rapportée d’Angleterre par les maçons Savoyards, qui avaient accompagné Éléonore de Provence, fille de Béatrice de Savoie, auprès de son futur époux, Henri III Plantagenêt :

  • La tour dite « sarrasine » : tour carrée de 10 m de côté, 2,50 m d’épaisseur, 15 m de haut (réduite de 6 ou 10 m avant la Révolution).
  • La seconde tour était le prolongement vertical du four seigneurial, qui existe toujours. On ne précise pas à quelle époque exacte sa partie supérieure a été détruite.

L’abbaye de Cluny, qui avait reçu de Richaud en don une partie de Rosans et de Saint-André, fit construire un prieuré (vers 1114) à 150 mètres environ au-dessus du château, en dehors du barri (les remparts), et à côté de ce prieuré, une nouvelle et vaste église « Notre Dame la Blanche » qui devint l’église paroissiale.
Le territoire de la paroisse a de tous temps été partagé entre plusieurs co-seigneuries, dont l’une des plus importantes était liée à la famille « de Rosans », famille que l’on peut suivre depuis Gaudemar en 1027 jusqu’en 1581. Cette famille tenait sa châtellenie de Rosans des Mévouillon, importante dynastie qui contrôlait toute la région.
Si c’est en 1562 que l’on date le début des guerres de religions, de nombreuses guerres avaient auparavant ravagé la région. Une des plus importantes avait opposé pendant de longues années le Dauphiné et la Provence : C’est ainsi qu’en 1369 les Provençaux avaient envahi les Baronnies et le Gapençais. Venant de Verclause ils semèrent la terreur pendant deux ans : le prieuré de Saint-André et beaucoup de villages furent détruits. Rosans ne fut pas épargné, mais avec sa garnison et ses remparts résista mieux.

Lesdiguières et les d’Yse

Entre 1573 et 1575 Charles Dupuy-Montbrun, chef des protestants, détruisit tous les établissements et toutes les églises catholiques de la région. On peut lui imputer la destruction de l’église Notre-Dame la Blanche à Rosans. Un des rares vestiges qui en subsiste est une petite colonne sculptée d’environ 30 cm de haut : elle a été incluse dans la partie inférieure de l’œil de bœuf du petit cabanon situé sur la place de Rosans entre l’église et la poste.
Après la mort de Montbrun, pris et exécuté par le roi, à qui il avait enlevé un convoi d’argent, Lesdiguières devint le chef du parti protestant, mais beaucoup plus tolérant, il limita les exactions.
C’est en 1576 qu’il achète à Delphine de Rosans la seigneurie de Rosans. Il fait agrandir le château, dont la partie Est parait dater du XVe siècle, et vers 1590 ordonne la construction des écuries du « grand jeon », une pour les chevaux, face au château, trois pour les bœufs à la suite. Deux seulement sur les quatre sont encore dans un état satisfaisant : la première au dessous de la poste et la quatrième, tout au bout du bloc.
C’est en 1600 que Jean-Antoine d’Yse surnommé Capitaine Rosans achète à Lesdiguières le château de Rosans, « juridiction haute, moyenne, basse, mère, mixte et impere… ». Le vendeur fait écrire dans l’acte que « les deux grandes tours, l’une près de l’autre, avec leurs régales sont inhabitables et presque démolies ».
Les armoiries de la famille d’Yse ( Dyse ou Dise ) étaient « d’argent, au lion de gueules, à la bande d’azur chargée en chef d’une fleur de lis d’or, brochant sur le tout ». Leur devise « deo duce , ferro comite« – Dieu pour guide, l’épée pour compagne – figure toujours sur le fronton de la porte d’entrée intérieure à la cour du château (datée du 10 août 1612). Le cachet de la mairie de Rosans, réalisé vers 1929 reprend cette armoirie, mais la réunit arbitrairement aux trois roses figurant dans les armes de la famille de Rosans.
Beaucoup de ces convertis ne l’étaient que de « bouche » et en 1741 on ne comptait plus que 55 familles protestantes sur les 185 que comptait la commune.
Comme Lesdiguières, les d’Yse étaient protestants et aucun service religieux catholique ne fut célébré à Rosans pendant quelques vingt ans, à la fin des années 1500.
En 1600 les protestants étaient plus nombreux que les catholiques, mais peu à peu, avec les persécutions, les conversions forcées, leurs rangs s’éclaircirent.
En 1685 une abjuration massive fut organisée, si bien qu’en 1710 il y avait 66 familles nouvellement converties sur un total de 185 familles recensées.

La Révolution de 1789

En 1789 la révolution fut bien accueillie et de nombreuses fêtes patriotiques furent organisées presque partout. Le premier arbre de la liberté, un peuplier, fut planté sur la place de Rosans. Il existait encore au début des années 1930, son pied enserré dans un mur circulaire de plus d’un mètre de haut pour éviter qu’il ne s’effondre car son large tronc était creusé par les ans. D’autres arbres, toujours des peupliers, furent plantés à toutes les révolutions qui suivirent.

Le dix-neuvième siècle

L’ église étant devenue insuffisante pour recevoir tous les fidèles, l’actif et zélé Abbé Richier, originaire de Gap, réussit à vaincre les résistances, qui n’étaient pas minces, et à obtenir la construction d’une nouvelle église. Décidée en 1845 on ne posa la première pierre (qui occupe l’angle oriental de la façade, accompagnée de 3 médailles) suivie de la bénédiction traditionnelle que le 17 mai 1848.
Enfin en 1852 l’église, terminée, est consacrée le 9 novembre par Mgr Depery. Elle avait coûté 22 500 Francs. Située au nord de la place, à quelques mètres en contre-bas de l’ancienne église Notre-Dame la Blanche, elle est dédiée à St Jacques le Majeur. Sa façade principale à frontons triangulaires est contrairement à l’usage orientée au Midi.
Une cloche de 484 kg fut installée en 1846, en remplacement de la cloche brisée en 1838. Elle sera à son tour brisée en 1918 dans la joie de la célébration de l’Armistice. Ce n’est qu’en 1924 qu’une nouvelle cloche, appelée Marie-Antoinette sera installée dans la nouvelle église.
Dans le même temps, entre 1845 et 1847, un temple était construit au couchant du bourg. D’un coût de 18 000 Francs, il fut entièrement payé par le gouvernement de Louis-Philippe (1830 – 1848).
Il fut utilisé jusqu’aux environs de la guerre de 1939, le pasteur venait de Trescléoux, puis pendant quelques années par le syndicat agricole pour y stocker des produits variés : semences, engrais, etc.
Enfin en 1985 il sera réhabilité pour devenir la mairie de Rosans, avec deux grandes salles aux deuxième et troisième niveaux.

Le problème des routes

Deux voies romaines reliaient La Bâtie-Montsaléon à Aouste, au bord du Rhône, en suivant la vallée de l’Aygues : la première, de seconde catégorie (Acta) empruntait le cours même de la rivière, avec toutes les difficultés que l’on peut concevoir. La seconde (Iter) était un simple chemin muletier qui serpentait à quelques mètres au-dessus de la rivière : on en trouve encore des traces fléchées dans les gorges de l’Aygues.

La nécessité d’une route ouverte au roulage s’imposait de plus en plus, mais il fallut attendre le Premier Consul, qui décidera enfin de construire la route de Serres à Pont-St-Esprit. Sa réalisation était difficile à cause du relief tourmenté, mais surtout à cause des gorges de la Blême et de l’Aygues.
En réalité, il fallut attendre une cinquantaine d’années avant qu’elle ne soit totalement ouverte.

A propos de la fontaine de la place, construite en 1806, Ladoucette, préfet des Hautes Alpes et constructeur d’une partie de la route de Serres à L’Épine, écrivit le texte suivant :
« La reconnaissance m’oblige de dire qu’après avoir construit, par prestations en nature, une place publique, la commune y a érigé en pierres de taille, et sur un joli modèle une fontaine publique à laquelle elle a donné mon nom, afin que la gratitude fut dans mon cœur égale à l’affection« .

L’époque récente

La résistance, à Rosans, a commencé en 1942 avec un premier et unique maquis où ne vivait qu’un seul maquisard. Il deviendra plus tard un peintre connu. Ce premier maquis devint peu à peu plus important, d’autres vinrent le rejoindre : à l’Essaillon, à Chauvac.
La vallée de Montclus à Nyons a été libérée dès le 6 juin 1944.
Les Allemands dans le cadre de l’attaque du Vercors furent repoussés une première fois, mais ils réussirent à franchir, en les contournant, les gorges de Montclus.
Rosans eut la grande chance de ne pas être détruit.

Mis à jour le 26 septembre 1998